mercredi 23 mai 2018 à 18h30

réflexion collective : bénéficier de privilèges

En tant qu'hommes, que personnes blanches, qu'hétérosexuels, que personnes cis-genre, etc., beaucoup de situations sont plus faciles pour nous : trouver un logement ou un emploi, entrer dans un magasin sans être suivi par les vigiles, marcher dans la rue sans crainte du harcèlement sexuel, etc. Ce quotidien nous semble pourtant relever de l'évidence, et nous avons du mal à nous représenter les discriminations subies par des personnes occupant d'autres positions. Toute personne de bonne volonté pour retourner les rapports de domination doit pourtant faire face au fait qu'elle peut bénéficier de tels rapports, même passivement, involontairement, inconsciemment. Un tel rappel est parfois difficile à entendre pour les personnes concernées, qui ne voient pas pourquoi elles se feraient appeler "dominants" alors qu'elles sont vigilantes à ne pas reconduire les rapports de domination dont elles ont conscience. Mais l'inverse est encore plus vrai : les personnes subissant de telles dominations structurelles peuvent se trouver blessées de voir des personnes privilégiées parler de discriminations dont elles ne feront pas l'expérience quotidienne, voire d'en parler au nom de celles qui les subissent. Et pourtant, il faut bien pouvoir que les hommes blancs hétérosexuels cisgenre etc. évoquent ces discriminations, ne serait-ce que pour en prendre conscience, et comprendre ce qu'ils veulent faire au quotidien pour éviter de les reconduire. Beaucoup de discussions sur le féminisme prennent un tour violent, d'un côté comme de l'autre, lorsque les privilégiés, même engagés de bonne volonté dans une démarche de remise en question, ne comprennent pas pourquoi leur prise de parole peut heurter des personnes dominées, pourquoi ils sont en permanence renvoyés à leur position de privilégiés, etc.

  • Comment une personne se trouvant du côté favorisé peut-elle prendre conscience de sa position, éviter de la reconduire à son échelle ? Quelles actions et discours relèvent de sa compétence, et lesquels seraient perçus comme déplacés par les personnes subissant une domination ? Qu'est-ce qui rendrait "déplacées" de telles actions ou discours ?
  • Quelle différence cela fait-il, pour un homme, de se revendiquer féministe, pro-féministe, "allié", "complice", etc. ?
  • Si un argument est bon ou mauvais indépendamment de qui l'énonce (du point de vue de son analyse philosophique ou logique), cela signifie-t-il pour autant que des propos sur les dominations ont la même valeur, le même effet, tenus par des personnes bénéficiant d'une domination structurelle ou la subissant ? Comment prendre en compte la standpoint theory (thèse selon laquelle la position d'énonciation influence la pertinence du propos) sans tomber dans l'argument ad hominem (la réduction de la validité d'un argument aux propriétés de la personne qui l'énonce) ?
  • etc.

Nous travaillerons principalement sur ces deux textes :

- une présentation des théories du standpoint, par Anne-Charlotte Husson : https://cafaitgenre.org/2014/04/15/une-questi…

- un texte critique, écrit par Léo Thiers-Vidal, concernant la position des hommes dans le féminisme : http://1libertaire.free.fr/LeoThiersVidal02.h…

(ailleurs, Léo Thiers-Vidal critique aussi la domination masculine de Bourdieu : http://1libertaire.free.fr/LeoThiersVidal06.h…)

Quelques autres articles qui peuvent nourrir le débat :

Deux petites vidéos youtube, la première sur la kyriarchie, la seconde sur le standpoint (mais elles sont en anglais, ça constitue une autre forme de privilège j'imagine) :

Trois bouquins :

  • Elisabeth Badinter, XY, de l'identité masculine
  • Georges Falconnet & Nadine Lefaucheur, la fabrication des mâles
  • John Stoltenberg, Refuser D'être un Homme : Pour en Finir Avec la Virilité

Source : https://atelierpratiqueautogestionrennes.word…
Source : message reçu le 18 mai 12h